Ils sont morts… 7 janvier 2015, à Charlie hebdo …
dimanche 11 janvier 2015 dans Ici et là
Voir en ligne : http://aael-toulouse.eklablog.com/
- Article de nos amis de L’AAEL, Association pour l’Art et l’Expression Libres, que nous relayons :
Avant tout, et quoi que nous en disions, nous sommes épouvantés ! personne, et surtout pas ceux qui ont le courage de résister, ne mérite de mourir comme ça ! exécuté, sans pouvoir dire un mot, sans pouvoir exprimer le moindre message… foudroyé par la haine imbécile, sourde et aveugle ! Alors, bien sûr que nous sommes touchés, bien sûr que nous pensons avec émotion et tristesse à ces copains de toujours, et évidemment, nous sommes solidaires de Charlie blessé et nous le serons de Charlie renaissant, résistant… Mais au-delà de cette peine, nous qui sommes particulièrement attachés à l’expression libre, notre objectif depuis tant d’années, nous sommes aussi profondément irrités par l’utilisation de pure circonstance, superficielle, hypocrite, qui est faite de cette notion ; nous saturons déjà des déclarations et des trémolos qui dégoulinent de nos télés et qui, en réalité, ne changent pas et n’ont aucunement l’intention de changer notre monde de merde.…
Vous avez dit « liberté d’expression » ?
Et depuis quand vous importe-t-elle, la liberté d’expression ? Vous, les puissants, vous, les maîtres de la pensée dominante, vous les tartuffes, les règlementeurs, les censeurs, les communicants ?
Et depuis quand avons-nous cette liberté, et les moyens de cette liberté, nous, les pauvres, les obscurs, les ordinaires ? Depuis quand acceptez-vous que l’on remette en cause votre ordre, vos décisions, vos profits, vos discours ?
Certes, tout le monde n’utilise pas la kalachnikov pour imposer sa façon de penser, mais la « liberté d’expression », elle ne revient sur le tapis que quand elle est mise en cause par « les autres » : les méchants. Nous, les occidentaux, nous avons la liberté de rire, un peu, mais pas trop, de nous révolter, mais dans les clous, d’avoir des idées, oui, mais les bonnes !
Ne nous faites pas rigoler, gens de pouvoir, la liberté d’expression, la liberté de pensée même, vous vous en tamponnez ! et vous savez la manipuler à votre avantage, dans un sens, puis dans l’autre…
Tout ça pour dire, que dans l’horreur de ce qui est arrivé, ce n’est pas tant la liberté d’expression qui est en cause, mais la vie même de ceux qui ne se soumettent pas, de ceux qui sont morts sous les balles de fous de dieu, et en d’autres temps auraient pu être assassinés par les fachos du coin, ceux qui, en tous temps, ont lutté contre la connerie humaine d’où qu’elle vienne, l’intolérance, l’aliénation, le fascisme, le racisme, le pouvoir des religions, de l’argent-roi, l’injustice, l’inégalité etc. etc.
Le problème c’est qu’ils sont morts, c’est qu’ils ne s’exprimeront plus, c’est vrai, et le problème c’est aussi ce flot de paroles inutiles qui accompagne leur mort, pour combien de jours ? qui sait ? combien faudra-t-il pour que les médias, qui se disent pourtant tellement concernés, trouvent un autre sujet, même moins spectaculaire, mais nouveau ? n’est-ce pas la loi de la presse ? bien davantage que la liberté d’expression ?
Ce ne sont pas des journalistes que nous avons perdu, ce sont des êtres humains. Ils avaient choisi la caricature, la dérision pour dire des choses, mais c’étaient avant tout des personnes, des copains, avec des idées qui ne plaisaient certainement pas à nos hommes et femmes politiques, si "émus" aujourd’hui !
Il y aurait tant à dire sur ce qui génère la dérive meurtrière, insensée de ces déments qui sont capables de tuer pour un dessin, pour qui la mort ne veut rien dire d’autre que la démonstration de leur supposée puissance, que l’on ne peut que trouver dérisoire ce qu’il en ressort, et ce qui va en découler, de racisme larvé, de déclarations de pure forme, et, au fond, d’indifférence profonde.
Aujourd’hui, l’émotion, un monde fou dans les rues, on peut s’en réjouir, mais hélas demain, le train-train, les sous, le travail, la famille, et bien sûr, la patrie !
à suivre
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Un autre article : Ces morts que nous n’allons pas pleurer, Par Mathias Delori, Chercheur CNRS au Centre Emile Durkheim de Sciences Po Bordeaux
A lire ici : http://blogs.mediapart.fr/blog/mathiasdelori/080115/ces-morts-que-nous-n-allons-pas-pleurer