Censure : les webTV en Italie, c’est fini

mercredi 20 janvier 2010 dans Ici et là


Source readwriteweb

La vidéo en ligne en Italie, c’est fini. Désormais, il faudra obtenir une autorisation préalable, sous forme de licence, auprès du ministère des communications Italien.

L’opposition locale a eu beau s’opposer de toutes ses forces, le gouvernement de Berlusconi, connu pour son intégrité et son respect du droit, s’est contenté de dire qu’il ne faisait qu’appliquer une directive européenne sur le placement de produit. On imagine la tête de Margot Wallström, la commissaire Européenne chargé de la communication, également vice présidente de la Commission Européenne, d’origine Suédoise, connue pour avoir une toute autre vision de la liberté d’expression.

Jeudi l’opposition Italienne a tenu une conférence de presse pour signifier son mécontentement, et expliquer en quoi cette nouvelle loi était selon eux une atteinte à la liberté d’expression.

“La loi assujetti la retransmission d’images sur le web aux mêmes règles caractéristiques de la télévision, qui requièrent une autorisation préalable à toute diffusion par le ministère de la communication, c’est une limitation incroyable de la façon dont l’internet fonctionne jusqu’ici” a rappelé Paolo Gentiloni, membre de l’opposition.

L’article 4 de la loi,qui entrera en vigueur à la fin du mois, précise que “la diffusion et la distribution sur internet d’images animées, accompagnées ou non de son” nécessitera désormais une autorisation ministérielle, mettant tout internaute diffusant une vidéo sur un site comme YouTube ou Dailymotion dans les mêmes obligations réglementaires que la RAI. On imagine la quantité de paperasse administrative à remplir avant d’obtenir un tel sésame.

De nombreuses organisations ont condamné cette loi : Articolo 21, qui défend la liberté d’expression garantie dans l’article 21 de la constitution Italienne, déclare que “ces mesures ressemblent à une tentative d’un gouvernement précédent [déjà sous Berlusconi], qui avait tenté d’imposer aux bloggeurs les mêmes obligations et responsabilités que les journaux”. Dans un appel lancé vendredi dernier, Articolo 21 affirme que “ces restrictions empêcheront le témoignage de la vie des Italiens sous forme d’images animées sur internet”.

Nicolas D’Angelo, l’un des commissaires de l’autorité des communications, appelée à jouer un rôle dans la police des droits d’auteurs à travers cette nouvelle législation, a déclaré à la radio durant une interview que cette loi était contraire à l’esprit de la directive Européenne qu’elle est censée décliner dans la législation locale. Il a ajouté que l’Italie devenait “le seul pays occidental dans lequel une autorisation gouvernementale préalable serait nécessaire avant d’utiliser ce genre de service”, ajoutant que “cet aspect fait planer un risque pour la démocratie, quelque soit la personne au pouvoir”.

D’autres critiquent la loi comme étant le résultat d’un conflit d’intérêts entre Silvio Berlusconi, qui exerce un contrôle politique sur les chaînes de télévision nationales en tant que premier ministre, et qui est également l’actionnaire principal du plus grand réseau de télévision du pays, Mediaset.

Sous cette nouvelle législation, les internautes ne pourront plus partager des clips extraits d’emissions de télévision, faisant ainsi table rase de la concurrence à l’heure où Mediaset s’apprête à inverstir la télévision sur IP. Alessandro Gilioli, un blogeur bien connu en Italie, a écrit que cette loi n’avait pour seul but que celui d’écraser la concurrence des webTV indépendantes, tant que celles-ci sont encore embryonnaires. “C’est la méthode Berlusconi”, commente-il, “Tuez vos ennemis tant qu’il sont petits”, “Voilà pourquoi tous ceux qui font des webTV, même dans leur garage, doivent obtenir une autorisation gouvernementale et franchir une multitude de barrages administratifs”.

De son coté, Paolo Romani, le rapporteur de la loi, insiste sur le fait que « cette loi n’est que l’application d’une directive Européenne”.

La fin d’une époque

Tout comme en Italie, les webTV indépendantes sont encore dans leur petite enfance en France, leurs moyens très réduits font que très peu d’entre elles disposent de leurs propre CDN [système de diffusion] et reposent sur YouTube ou des services similaires, réduisant d’autant leur indépendance.

La plupart d’entre elles vont disparaitre sous peu, car il va leur falloir trouver très rapidement d’importantes ressources financières pour survivre et franchir ne serait-ce que le cap des formalités administratives à remplir.

La similarité des situations médiatiques Française et Italienne laisse présager qu’une telle loi arrivera tôt ou tard en France, probablement, comme cela a déjà été évoqué par de nombreux politiciens, par le biais d’un contrôle du CSA sur la vidéo sur internet.

C’est tout l’écosystème des webTV qui en sera affecté, car bien peu d’entre elles survivront, sans même parler d’une hécatombe dans les clips issus d’émissions qui font la joie des internautes sur YouTube.

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